lundi 8 octobre 2012

VIII.



Trois hommes vinrent à notre rencontre. Ils étaient taillés dans le même moule : grands, larges, costauds, impressionnants. Rafael avança et les prit un par un dans ses bras. Des cousins, probablement… 
- Ils vont nous fouiller, me dit-il. 
Je me penchais contre le pick-up, écartant les bras et les jambes. L’un d’entre eux fit glisser un détecteur sur mon corps puis me passa ses immenses mains velues à la recherche de je ne sais quel objet dangereux. Je lui tendis mon sac contenant les appareils photos. Il l’ouvrit, s’accroupit sur le sol et délicatement sortit tout ce qu’il contenait. Il vérifia chaque appareil méticuleusement. Il se releva après avoir rangé les appareils dans le sac et me le rendit. Il fit signe à Rafael que tout allait bien. Rafael et moi les suivirent tandis qu’un des jumeaux restait près des voitures alors que l’autre venait avec nous. Nous passâmes par un escalier qui nous conduisit dans un long couloir sombre proposant quatre cabines d’ascenseur. Je ne disais rien. Rafael m’avait prévenu que si je voulais parler, il faudrait que ce soit en espagnol. A aucun moment je ne devais parler anglais ou français. Nous montâmes dans la première cabine qui voulut bien s’ouvrir. A six nous étions un peu serrés et je redoutai un instant qu’une alarme ne vienne nous avertir que l’ensemble de nos corps dépasse le poids total autorisé, mais la cabine s’éleva dès que l’un des trois hommes entra un code. Le silence était presque gênant. La cabine s’arrêta au dernier étage, du moins si j’en croyais les chiffres lumineux affichés au dessus de la porte. Nous sortîmes lentement et un autre homme, portant un fusil mitrailleur en bandoulière, nous attendait devant une porte vitrée. Il demanda à nouveau à fouiller tout le monde et l’opération du parking recommença exactement de la même manière. Puis nous entrâmes dans la pièce située derrière la porte. C’était un gigantesque bureau, contenant quatre canapés de cuir, une longue table de bois brun et, devant une baie vitrée plus large que la vitrine d’un grand magasin parisien, un bureau de verre. Un homme, petit et replet, se tenait devant la baie, nous tournant le dos, il semblait contempler le monde. Nous restâmes debout sans rien dire pendant au moins une minute. Et une minute dans ce genre de situation, c’est long. Il se tourna enfin vers nous. Je découvris un visage fatigué, rond, mal rasé, qui nous souriait. Il ressemblait vaguement à celui de l’homme vu tant de fois à la télévision pour nous raconter ses exploits. Il s’approcha de moi et me tendit la main. Je la serrais en disant en espagnol : « merci de nous accueillir ».
- C’est normal, répondit-il. C’est normal. Je connais votre travail et je l’apprécie beaucoup. Quand Rafael m’a contacté j’ai tout de suite été flatté et j’ai accepté de vous rencontrer.
Il me montra du doigt l’un des canapés sur lequel je m’assis. Il s’assit sur celui d’en face. Je sortis mes appareils.
- Mon travail n’est pas que photographique, dis-je. J’aimerais aussi parler avec vous. De votre travail mais aussi de la frontière. Je crois que vous êtes né aux Etats-Unis ?
- Oui. Mes parents venaient de s’installer là-bas. Bon pas tellement légalement en vérité. Si bien que j’ai la nationalité américaine mais mes racines sont ici, au Mexique. Je suis mexicain avant tout et très fier de l’être. Je crois d’ailleurs que c’est l’amour de mon pays qui me pousse à continuer le travail pour lequel je suis fait. Cette fierté me donne la force de lutter chaque jour contre la corruption. C’est cette corruption qui détruit le Mexique.
- Vous risquez votre vie. Je vois d’ailleurs que les mesures de sécurité qui vous entourent sont assez développées.
- J’ai déjà connu plusieurs tentatives d’assassinat. On s’en est également pris à ma famille, mon épouse, mes deux filles. Aujourd’hui elles sont en sécurité à l’étranger. C’est vrai que j’ai une vie un peu particulière à cause de tout ça.
- Comment avez-vous commencé dans la police ?
- Comme tout le monde je dirais. Mes parents sont revenus au Mexique alors que j’avais quinze ans. Je n’étais pas obligé de rester ici comme je vous l’ai dit. Puisque je suis né aux Etats-Unis, je pouvais y rester. D’ailleurs mes deux frères et ma sœur y vivent. Légalement. Mais j’ai préféré revenir aussi. Bon j’étais encore jeune. J’ai suivi mes parents. Et à dix-huit ans je me suis engagé dans la police fédérale. J’ai commencé au bas de l’échelle. A patrouiller dans les rues de Tijuana. J’ai vite compris qu’il y a avait des intérêts communs entre les forces de l’ordre et les voyous. Pour avoir la paix, les voyous proposent de l’argent aux policiers et malheureusement, bien souvent, ils acceptent. Bon pas tout le monde. Je ne veux pas que vous pensiez que tout le monde est corrompu dans mon pays. Pas du tout. Seulement les salaires sont bas. Risquer sa vie pour des clopinettes, au bout d’un moment ça devient un problème. Vous avez une famille à nourrir, des enfants à envoyer à l’université ou alors simplement des goûts supérieurs à vos moyens financiers alors la tentation est grande. Et ici, la tentation, on vous la fait voir le plus souvent possible…
C’est alors que j’entendis une explosion dans mon dos. Je me retournai et vis le jumeau qui était venu avec nous, étalé par terre, trois mètres plus loin que la place qu’il occupait juste avant. L’homme au fusil mitrailleur commença à tirer en direction de la porte. Rafael qui était resté debout près du canapé se tourna vers moi et je lu la panique sur son visage. Luis Morales Patricio avait sorti son arme. Je ne savais pas quoi faire. Je me levai. Rafael plongea vers moi et me plaqua au sol.
- Ne bouge pas, me dit-il en espagnol.
Étalé comme je l’étais sous Rafael, je ne voyais plus rien. J’entendis plein de coups de feu. Je relevai la tête et vis Morales Patricio s’effondrer sur le canapé sur lequel il était assis quelques secondes plus tôt. Je vis des bas de pantalon avancer vers lui et le bout d’une arme de guerre pointée sur son visage. Le coup fut assourdissant. La tête de Morales Patricio éclata comme une tomate mûre jetée contre une falaise. Les assaillants s’approchèrent de Rafael et moi. Je sentis, plus que je ne vis, le corps de Rafael poussé sur un côté. Sans rien dire de plus le fusil d’assaut se posa sur sa tête. Le coup partit. La tête de Rafael se désintégra totalement. L’autre homme se pencha vers moi et me sourit. Il posa le canon d’un petit pistolet sur mon front et dit :
- Quieres vivir, gringo ?
Aucun son ne pu sortir de ma bouche. Il me sourit encore. Il appuya sur la détente.

FIN.

lundi 1 octobre 2012

VII.


- Tu es prêt ?
- Oui, dis-je en me relevant.
Je pris mon sac comprenant deux appareils, deux objectifs supplémentaires, un enregistreur numérique et une mini caméra HD. Nous montâmes dans le pick-up et je vis dans le rétroviseur les jumeaux grimper dans le 4x4.
- Ils vont nous suivre. Parfois nous précéder. Ils seront discrets mais leur présence est indispensable.
- Où va t-on ?
- Avenida Revolución.
L'Avenida Revolución est un grand boulevard qui commence juste après la frontière. On y trouve beaucoup  de magasins et de touristes, le jour comme la nuit.
- Tu vas rencontrer Luis Morales Patricio. C'est un des chefs de la police. Ici c'est un héros car il lutte contre les narcos et la corruption. Dans mon pays la corruption c'est comme la gangrène. Le jour où on parviendra à s'en débarrasser, on aura réussi à mettre le pays sur la bonne voie. Ce sera grâce à des hommes comme lui.
J'avais entendu parler de Luis Morales Patricio. Il dirigeait une unité spéciale de la police fédérale consacrée à traquer les policiers et politiciens corrompus. Il avait bonne réputation dans un pays où en effet l'argent des trafiquants servait souvent à payer des responsables politiques (ou autres).
- C'est un cousin ? C'est comme ça que tu as pu avoir un rendez-vous pour moi ? demandai-je.
- Non. Mais je le connais et puis il aime bien être vu. J'ai du respect pour lui, même s'il adore les caméras. Mais bon il est aussi marié à une cousine...
J'éclatais de rire. Mon projet consistait à réaliser les portraits d'hommes et de femmes acteurs de la frontière. Des deux côtés. Les portraits photographiques s'accompagnant de portraits écrits que j'allais aussi composer. Je savais qu'il fallait aussi jouer avec les égos pour obtenir ce que je voulais. Ce travail était déjà acheté par une galerie de L.A. Les photos seraient exposées sur les murs de la ville mais aussi dans un livre. Si le succès pointait le bout de son nez, l'expo voyagerait. 
L'Avenida Revolución était encombrée en cette fin d'après-midi, On avançait moins vite qu'au passage de la frontière à San Ysidro ce matin. Je regardai à travers la fenêtre les gringos interpellés tous les cinq mètres par des vendeurs de tee-shirts ou de corps humains. Sur l'Avenida on trouvait des prostituées facilement. Même pas la peine d'entrer dans les bars. Je savais que la nuit, le coin pouvait être dangereux.
Rafael fit entrer la voiture dans un parking sous-terrain et la rangea près d'une issue de secours. Le 4x4 des jumeaux s'arrêta juste à côté. Ils sortirent en même temps que nous. 

lundi 24 septembre 2012

VI.


Ce que je vis de Tijuana ressemblait à ce que j'en attendais. L'activité était frénétique et permanente. Je connais ces ambiances latines où l'on vit autant sinon plus sur les trottoirs que dans les maisons. 
- Comme je te l'ai expliqué amigo, on va s'installer chez un cousin. Il a une maison tranquille dans un quartier bourgeois. C'est une très belle maison. Avec piscine.
Je ne me souvenais pas qu'il m'ait expliqué tout ça mais peu importait. J'avais besoin d'un endroit calme pour écrire et préparer mes sorties.
- On a la maison pour nous. Le cousin est parti pour un moment.
Je l'interrogeai du regard.
- Il est en prison. C'est une injustice bien sûr.
- Bien sûr, dis-je. Tu as beaucoup de cousins en prison ?
- Non. Mais assez pour t'en faire rencontrer quelques uns.
Rafael ralentit la voiture devant une large porte de bois qui s'ouvrit automatiquement devant nous. Nous passâmes le porche et entrâmes dans une cour couverte de gravier et dans laquelle trônaient une Porsche, une Acura et un SUV Mitsubishi noir aux vitres teintées. Deux hommes aussi larges que hauts nous attendaient devant une longue maison blanche.
- Tes cousins je suppose ?
- Non, des amis d'enfance.
Rafael descendit du pick-up. Je fis comme lui. Il alla vers les deux hommes qui n'avaient pas bougé et les serra dans ses bras. Je m'approchai et leurs tendis la main. Ils la serrèrent en souriant.
- Bienvenido francés !
- Gracias.
- Je te présente Hector et Jaime. Ce sont des jumeaux, comme tu peux le voir.
Ils ne se ressemblaient pas du tout mais je ne dis rien.
- Ils vont nous accompagner partout où nous irons. C'est plus sage.
Nous entrâmes dans la maison. C'était un plain-pied sans décoration mais meublé comme dans un magazine. De grands murs blancs et, dans le salon, une immense baie vitrée qui donnait sur la piscine.
- C'est une piscine olympique ? demandai-je mais personne ne répondit.
- Tu as la grande chambre, par là, m'indiqua Rafael.
Je le suivis et vins déposer mes affaires dans une chambre aussi grande que mon appartement de Beverly Glen. Là aussi j'avais droit à une immense baie vitrée avec vue sur le bassin.
Ça ira pour toi ?
Je fis oui d'un signe de tête. Et ressortis.
- Tu veux te reposer ? Tu veux manger ?
- Non ça va. Toi ?
- Je vais manger quelque chose. Ici la nourriture est exceptionnelle. Tout est préparé par une femme qui cuisine mieux que les meilleurs chefs français ! Et puis c'est de la vraie nourriture, celle qui tient au corps.
Nous allâmes dans la cuisine où un festin nous attendait. Rafael mangea. Des tortillas remplies de haricots et de viande avec quelques piments qu'il accompagna de deux ou trois bières.
- C'est toujours toi qui va conduire ?
- Ne t'inquiète pas. Je ne suis pas bourré. Il m'en faut plus.
Je ne mangeai pas. Je retournai dans la chambre préparer mon matériel. On allait partir. Je m'allongeai sur le lit en attendant que Rafael finisse son goûter. Il vint me chercher une demi-heure plus tard.



mercredi 19 septembre 2012

V.


Après le passage, nous roulâmes quelques centaines de mètres dans une file dense sur une espèce d'échangeur d'autoroute. Rafael engagea alors la voiture sur une sortie pour arriver sur le parking d'un mall exclusivement composé de restaurants rapides. Il rangea la voiture près d'un énorme pick-up bleu devant lequel se tenait l'homme le plus gros que j'ai vu de ma vie. Rafael sortit de la voiture et vint serrer dans ses bras l'homme dont les cheveux plaqués en arrière semblaient être maintenus grâce à un litre entier de gel. Ils se parlèrent en espagnol mais si bas que je n'entendis pas. Rafael se tourna vers moi et me présenta le gros.
- C'est Flaco, mon cousin.
Je souris car je parle espagnol et je connaissais le sens du mot flaco.
- Flaco ?
- C'est ironique, précisa Rafael.
Flaco me fit un signe de tête sans rien dire.
- Flaco va garder la voiture et nous on va prendre la sienne.
Je remerciai Flaco. Nous transférâmes nos bagages dans le pick-up. Rafael reprit le volant. Je ne dis rien  et me mis à vérifier quelques paramètres de mon boitier photo. C'était le début de l'après-midi et nous étions déjà fatigués. Malgré le système de climatisation de la voiture, nous sentions la chaleur sur nos corps et je transpirai un peu. Rafael me parla de sa famille, surtout de ses enfants. Je l'écoutai distraitement.

lundi 17 septembre 2012

IV.


Une file d'attente commençait à se former. Nous n'avancions plus aussi vite. Beaucoup de camions et de voitures avec des plaques mexicaines. Dans le pick-up d'à côté, une enfant me souriait et me tendait une sorte de peluche. Je lui souriait à mon tour. Elle me tira la langue et dut dire quelque chose que je ne pouvais entendre car sa mère (je supposai qu'elle était sa mère), se tourna vers elle et, jetant un un rapide coup d'oeil vers moi, se mit à lui parler aussi et lui prit la peluche des mains. Nous avançâmes d'un cran et je les perdis de vue.
- N'ouvre pas la fenêtre amigo. Surtout pas. C'est un peu dangereux de faire ça.
- A cause des agressions ?
- Non amigo, à cause de la pollution !
Rafael se mit à rire. Très fort. Le passage de la frontière se fit assez facilement. Je vis Rafael faire signe à un douanier côté mexicain qui nous gratifia d'un pase pase. Nous étions donc au Mexique. Ce n'était pas la première fois pour moi mais pas dans ces conditions.
- Le douanier, tu le connais ?
- C'est un cousin, répondit Rafael.

lundi 3 septembre 2012

III.


La nuit fut courte mais je dors toujours très peu alors j'étais quand même en forme au réveil. A l'aéroport, première mauvaise surprise : le vol US Airways de 7h43 était annulé et on nous avait d'office replacé sur le vol suivant qui partait après 10h00.
- J'aurais pu dormir deux heures de plus, dit Rafael qui lui avait besoin de plus de sommeil que moi.
- Tu as lu le mémo que je t'ai fait sur mon projet ?
- Oui. Oui. Ne t'inquiète pas. On ira où tu veux aller. Ce qui est dommage, c'est qu'on n'ait pas le temps de passer par La Jolla... J'ai une bonne amie qui nous aurait accueilli.
Son visage de nuit trop courte m'arracha un sourire.
- Quand j'aurais fini, tu iras où tu voudras.
- Eh je disais ça pour toiÇa fait combien de temps que tu n'as pas... euh tu vois quoi...
- Pour ça non plus ne t"inquiète pas.
J'ai été marié deux fois. La première fois en France pendant un an. Ce fut horrible. La seconde fois aux Etats-Unis. Ce fut horrible aussi. mais cela m'a permis de m'installer dans ce pays.
Le vol dura moins d'une heure. Rafael avait déjà réservé la voiture à l'agence Avis, si bien que nous fûmes en route pour la frontière avant midi.
- En une demi-heure on y est tu sais. Je mangerais bien un morceau moi. Je me suis levé tôt. Je connais un endroit à Chula Vista... Et puis ça te mettra dans l'ambiance.
- Tu connais vraiment des endroits et des gens partout sur cette route toi.
- C'est pour ça qu'on m'embauche man !
La route était pleine à craquer. Dans l'autre sens, c'était pire. A Chula Vista, Rafael s'arrêta dans un mall.
- C'est là ton restaurant typique mexicain ?
- Ouais.
Nous entrâmes dans le centre commercial et il m'emmena directement au food court. Il se dirigea vers un Taco Bell et se tournant vers moi, me sourit.
- Tu plaisantes ? dis-je.
- Non, c'est le meilleur endroit, crois-moi.
- On en a vu plein sur la route des Taco Bell...
- Oui mais j'aime bien celui-là.
Rafael commanda pour nous deux et nous nous installâmes sur des sièges en plastique fixés au sol.
- J'espère pour toi que le reste ne sera pas comme ça.
- Qu'est-ce que tu dis amigo ?
- Je ne veux pas d'endroits trafiqués pour touristes à deux balles. J'ai besoin de rencontrer d'authentiques frontaliers. Tu le sais ça ?
- Ne t'inquiète pas amigo, Tu verras, tu seras très content.
Le doute m'envahit néanmoins. Sous un ciel bleu comme l'océan à la télé, nous reprîmes la route.
- La frontière est là, dit Rafael.

lundi 27 août 2012

II.

Rafael Hernandez Arroyo est mexicain. Il vit en Californie, près de Monterey et travaille pour les journalistes, les écrivains et aussi pour les studios de cinéma. Il est spécialiste du Mexique. Ce qui veut dire qu'on vient le chercher quand on veut recréer une réalité sans être trop à côté de la plaque. Quand des journalistes veulent écrire un article de fond sur le pays voisin, c'est vers lui qu'ils se tournent, idem pour les écrivains. Je l'ai connu sur le tournage d'une série télé ayant pour cadre le trafic de drogue. Aux Etats-Unis dès qu'on parle du Mexique, c'est souvent (pour ne pas dire tout le temps) pour évoquer le trafic de drogue ou l'immigration clandestine. Rafael connaît beaucoup de monde des deux côtés de la frontière, dans tous les milieux. Il est donc très précieux. Il est aussi mon ami.
- Tu es prêt ?
- Je ne sais pas, dis-je.
- Tu n'as pas peur au moins ?
- Non, je ne crois pas. Je suis avec toi.
Rafael va dormir chez moi cette nuit. Demain matin nous prendrons ensemble un avion pour San Diego puis une voiture pour aller à Tijuana.
- On commencera par le côté mexicain.
- Je sais, dit-il. Tu me l'as déjà dit.
- A mon avis, on va faire des allers-retours.
- Juste après la frontière on changera de voiture. Mon cousin gardera la caisse et on en prendra une avec des plaques mexicaines. Crois-moi sur parole, ça vaut mieux.
Je passai la soirée à préparer mes affaires et mon matériel tandis que Rafael téléphonait à des dizaines de personnes. Du moins c'est ce que je crus comprendre.